Magazine - S’il y a match, ne le cherchez pas !

Jusqu’au 28 octobre, la France est un peu plus ovale... Avec la Coupe du Monde à domicile, Jean-Marc Mottard, éleveur à Menomblet, savoure un peu plus sa passion du rugby.

Entre la maison et le hangar de l’exploitation, un but beaucoup trop haut pour laisser penser qu’ici on est fan de foot. « Il n’est pas homologué », rigole Antonin, grand gaillard de 16 ans, en regardant son paternel, Jean-Marc Mottard, à l’origine de ses trois morceaux de bois se croisant désormais un peu précairement. A la Haute-Fauconnière, à Menomblet, on aime le sport et particulièrement le rugby donc. 

Le jeune border collie s’est vu baptisé Uini, du prénom du joueur franco-néo-zélandais, Atonio, pilier droit au Stade rochelais. A l’heure de la Coupe du monde de l’ovalie, si le chien vit sa vie l’air de rien, son maître, lui, de ses propres mots, « devient Basque ». L’éleveur de canards et de bovins allaitants(1) l’avoue sans complexe, quoiqu’il arrive « un vêlage ou autre chose », quand le coup de sifflet retentit il sera devant sa télé. «Dans les Landes, vous ne trouverez pas un agriculteur sur un tracteur s’il y a un match ! », dit encore le quinquagénaire reprenant les propos d’un jeune véto de La Châtaigneraie, originaire du Sud-Ouest et rugbyman. Jean-Marc a d’ailleurs lu quelque part que ce sport british s’est développé en France notamment par l’entremise de l’école vétérinaire de Toulouse. «Les étudiants avaient besoin de gros gabarits pour leur équipe, alors ils sont allés chercher des gars bien bâtis dans les fermes»(2). Voilà donc le lien établi entre terre et terrain. Mais la Vendée n’est pas l’Occitanie, ici le ballon rond reste le favori des agriculteurs et sa version ovale l’exception. 

« Combativité, respect, fraternité » 

« Moi, au foot… j’avais les pieds carrés. J’ai d’abord préféré le volley, puis le judo», a vite tranché Jean-Marc dans sa jeunesse bocagère. Selon lui, le rapport au combat sur le tatami et au rugby se rejoint (« beaucoup de rugbymen pratiquent le judo, pour maîtriser des techniques de chute par exemple) ». Leurs valeurs aussi. « Combativité, respect, fraternité », répète le sportif amateur pour expliquer cette passion pas très locale, car « dans une équipe de rugby, l’éducation au respect passe avant les performances sportives !» Le corps-à-corps exige la déférence. « J'aime l'esprit d'équipe, l'engagement, le rassemblement et la solidarité » dit-il encore. « De ce côté-là, le foot c’est n’importe quoi ! », tranche le “fana” de rugby qui est parfois en désamour avec le business à onze. 

Le benjamin de ses trois enfants, Jean, 10 ans, a quand même opté pour le ballon rond. « Il a pourtant le gabarit pour le rugby », glisse le père lui laissant le temps, peut-être, de changer d’avis. Pas d’ostracisme de toute façon à la maison. Céline, épouse de Jean-Marc, « aime toutes les disciplines », elle est aussi passionnée du jeu à 15 ; tandis que l’aînée de la fratrie, Léanne, 18 ans, étudiante à La Rochelle, a choisi le sport fétiche de la famille « pour se détendre ». Chez les Mottard, c’est en fait Antonin le plus engagé en Ovalie. Après deux ou trois saisons au sein de l’équipe junior des Herbiers, l’ado se défoule désormais à Bressuire, au Club Ovalie du Bocage (Cob), en M19 (dernière étape avant la catégorie senior). Il est numéro 10 (comme Romain Ntamack et Matthieu Jalibert au XV de France). Jean-Marc accompagne cette équipe, prépare les sacs, le terrain, etc. «Houla oui… j’y passe du temps. Faut aller à Bressuire les mercredis et vendredis pour les entraînements, puis le match le week-end » du côté de la Charente-Maritime, voire plus loin (le championnat est régional). 

Fan de la Rochelle

Dilemme cette année, certaines compétitions dominicales d’Antonin interfèrent avec des rendez-vous du Stade Rochelais. Et ça c’est très embêtant ! Jean-Marc est abonné depuis sept ans au club jaune et noir. Il file régulièrement vers les gradins de Marcel-Deflandre, souvent avec un ami « encore plus mordu » que lui ! « Il faut vraiment un événement exceptionnel pour m’empêcher d’y aller », confesse le passionné. 

Jean-Marc est d’abord un inconditionnel rochelais avant d’être un supporter du XV de France. Ses vrais frissons il les a vécus avec la première finale des Maritimes en Coupe d’Europe remportée en 2022 (puis en 2023) « trop stressé pour rester devant la télé ». Les échéances du Mondial, il préfère les aborder tranquillement chez lui, avec sa famille. Jean-Marc n’ira pas dans un des neuf stades accueillant les 48 matchs; «l’équipe de France ne joue pas à Nantes, alors…. ». Il observera particulièrement les All Blacks et les Fidjiens « car certains jouent en France, dont Botia, troisième ligne à la Rochelle ». Alors notez bien les horaires et jours des compétitions ovales si vous voulez déranger Jean-Marc. 

Catherine Baty 

1. 1200 m2 de canards prêts à gaver, 90 vaches allaitantes, 120 ha SAU.

2. Le club de l’école vétérinaire de Toulouse fut d’ailleurs l’un des fondements de ce qui deviendra le stade toulousain. Le rugby a longtemps été un sport étudiant. 

Vous n’y connaissez rien  ? 

« Pour ceux qui veulent découvrir ou mieux connaître le rugby, je leur conseille tout simplement d’aller voir un match ! Pas forcément de haut niveau mais plutôt dans un club de proximité : Bressuire, Les Herbiers, Les Sables d’Olonne, La Roche-sur-Yon… Déjà ils sentiront l’ambiance entre supporters. J’ai emmené un copain, pourtant pas très motivé à la base, assister à un match des seniors à Bressuire. Eh ben ! Après le match il m’a tout de suite dit : « quand est-ce qu’on y retourne ?! » Il était super content. Il ne se doutait pas du bon niveau de l’échelon régional. Y’a autant d’intensité que chez des pro ». Quant à La Rochelle, mieux vaut avoir un bon réseau (ou un bon copain déjà abonné !) car 7200 personnes sont sur la liste d’attente pour accéder au graal de l’abonnement…