Expérimentation - Houblon et panneau s’acclimatent-ils bien ?

À Luçon, une houblonnière est abritée par 52 modules solaires dont la structure sert de support aux lianes de la plante. L’ambition est de développer cette production agrivoltaïque sur 30 ha.

Il y a un peu plus d’un an, 52 modules solaires étaient érigés à Luçon, en périphérie urbaine, à proximité du hangar de la Cuma, sur l’une des parcelles d’Emmanuel Murail, céréalier*. Sous cette centrale, 72 plants de houblon mis en culture sur 1200 m2. Cette expérimentation d’agrivoltaïsme était alors unique en France : la structure des panneaux solaires servant de support à la houblonnière (la plante est une liane). « Je voulais diversifier mes productions et le houblon m’intéressait par son fort potentiel (80 % des besoins français sont importés) », resitue l’exploitant du sud-Vendée entré en contact avec la société Q Energy développant des projets agrivoltaïques. Après une phase d’expérimentation de deux récoltes, l’ambition est de lancer une mise en culture réelle fin 2025, sur 30 ha, couplée d’une production de 25 mégawatts,. Emmanuel Murail doit intégrer le capital de la société qui commercialisera l’énergie. 

Quels rendements ?

L’expérimentation, elle, est ciblée sur la performance de la houblonnière et l’incidence des panneaux sur ce développement. « Est-ce que la culture du houblon s’acclimate bien sous des panneaux ? Est-ce que cette association est possible ? », résume Delphine Molenat, responsable territoire sud-Vendée à la chambre d’agriculture en charge du suivi agronomique (rendement, comportements physiologiques de la plante, rentabilité).

« La récolte 2022 (entre mi-août et mi-septembre, selon les variétés) fut plutôt encourageante, au-delà de nos espérances, indique déjà satisfait Emmanuel Murail, on a atteint un rendement total d’une vingtaine de kilogrammes pour la parcelle équipée du prototype». « La deuxième récolte devrait fournir des données plus représentatives, avertit quand même Delphine Molenat, car le houblon est une culture pérenne qui nécessite au moins trois ans pour se stabiliser. Les premières années sont généralement entre 30 à 40 % en dessous du potentiel ». 

Pour la campagne 2023 des ajustements ont été apportés afin de densifier la production et de tendre vers des rendements similaires à ceux de la parcelle témoin (celle sans panneau) : deux rangs ont été ajoutés côté sud, doublant le nombre de pieds. 

Moins d’eau ?

Un objectif d’autant plus important que la productivité est l’une des conditions fixées dans la loi définissant l’agrivoltaïsme (lire ci-contre) : « l’amélioration du potentiel et de l’impact agronomiques ». 

Des compteurs d’eau ont également complété le dispositif. « Les sondes d’irrigation installées au démarrage ont permis de mettre en évidence une consommation plus sobre sous la centrale mais sans pouvoir la quantifier. Cette année, nous allons pouvoir préciser cette variable », explique Delphine Molenat. Là aussi les résultats pourraient argumenter en faveur de l’agrivoltaïsme si les besoins d’irrigation s’avèrent plus faibles qu’en système classique. 

Pour le moment, le permis de construire est en cours d’instruction. « Mon dossier sera soumis à l’avis de la CDPenaf (Commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers, NDLR) en mai, il y aura une enquête publique. Et si tout est accepté, les travaux nécessiteront un an de chantier », précise Emmanuel Murail. « Ça fait trois ans que je crois en ce projet, alors j’ai envie d’être optimiste quant à son issue ! L’agriculture a son rôle à jouer dans le développement des énergies renouvelables tout en restant compatible avec sa vocation nourricière », défend le chef d’exploitation. Déjà plusieurs producteurs de houblon du Nord et d’Alsace, bassins de production historiques, mais aussi du Gers, doivent venir jusqu’à Luçon pour étudier de près son installation. 
 

*Emmanuel Murail exploite (en individuel) 150 ha à Grues, Luçon et aux Magnils-Reigniers.

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Quelle définition de l’agrivoltaïsme ?

Une installation agrivoltaïque est une installation de production d’électricité utilisant l’énergie radiative du soleil et dont les modules sont situés sur une parcelle agricole où ils contribuent durablement à l’installation, au maintien ou au développement d’une production agricole.

Est considérée comme agrivoltaïque une installation qui apporte directement à la parcelle agricole au moins l’un des services suivants, en garantissant à un agriculteur actif ou à une exploitation agricole à vocation pédagogique gérée par un établissement relevant du titre Ier du livre VIII du code rural et de la pêche maritime une production agricole significative et un revenu durable en étant issu :

1° L’amélioration du potentiel et de l’impact agronomiques ;

2° L’adaptation au changement climatique ;

3° La protection contre les aléas ;

4° L’amélioration du bien‑être animal.

Ne peut pas être considérée comme agrivoltaïque une installation qui porte une atteinte substantielle à l’un des services mentionnés aux 1° à 4° du II ou une atteinte limitée à deux de ces services.

Ne peut pas être considérée comme agrivoltaïque une installation qui présente au moins l’une des caractéristiques suivantes :

1° Elle ne permet pas à la production agricole d’être l’activité principale de la parcelle agricole ;

2° Elle n’est pas réversible.
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Source : Art. L. 314‑36. Extrait de la Loi sur l’accélération des énergies renouvelables (en attente des décrets d’application)